Le président Emmanuel Macron souhaite vivement mettre en œuvre son programme sur le service national universel (SNU), obligatoire de trois à six mois, qui ne serait pas forcément que militaire, enfin, on ne sait pas trop. Il faut tout d’abord savoir que le président Jacques Chirac n’a fait que suspendre le service national d’alors. Donc, on peut le réinstaurer du jour au lendemain. Sauf que cela s’appliquerait à toute une classe d’âge de filles et de garçons entre 18 et 21 ans pour « apprendre les gestes qui sauvent, la conduite à tenir en cas de cataclysme, d’attentats, d’états de guerre » dixit Geneviève Darrieussecq, secrétaire d’état auprès du ministre des armées. Le ministère de la défense d’alors (Monsieur Le Drian en tête) et l’ancien chef d’état-major des armées, le général Pierre De Villiers, étaient défavorables à cette remise en place car les armées n’ont plus les cadres disponibles, ni les locaux, ni le savoir-faire. La budgétisation a été sous estimée : il prévoit 3 Mds € par an ; selon certains calculs, c’est dix fois plus qu’il serait nécessaire pour le remettre en route (rachat des locaux, salaires ou soldes des encadrants, etc.)! Pour quel résultat ? Pour favoriser la « mixité sociale », l’apprentissage de la « république » et les quelques gestes de secourisme ? Mais on plaisante ?

Non, on ne se pince pas, on ne rigole pas, le président Macron veut apprendre la vie à nos jeunes !

Revenons un peu en arrière : le service national était dévolu uniquement aux garçons et aux filles volontaires pour une durée qui variait selon la situation géopolitique. Par exemple, en 1962, le service militaire était de 24 mois. En 1990, il était de 12 mois, puis jusqu’en 1997, de 10 mois. Le pouvoir d’alors n’était pas descendu en-dessous, car cela n’était plus intéressant pour les armées ; il fallait au moins 2 à 3 mois pour former une recrue (le temps actuel pour former un engagé dans sa partie initiale au CFIM*). Ensuite, il suivait un cursus de spécialisation directement en unité de combat qui pouvait durer de 2 à 4 mois en moyenne. Et nous avions des militaires sachant combattre quand ils finissaient leur service national. C’était l’objectif principal. Certains effectuaient un service civique. Mais la durée était souvent doublée pour compenser d’être en quelque sorte « planqué ».

Or, Emmanuel Macron veut faire faire un service pas forcément militaire de trois à six mois pour toute une classe d’âge ! Tout d’abord, la durée est grotesque (jusqu’à trois mois, cela ne sert à rien pour les armées, aucun retour sur investissement et dans le civil, c’est à peu près pareil). De trois à six mois, les armées pourraient profiter de quelques métiers spécifiques qui ne nécessitent pas de spécialisation, comme les métiers manuels tels que cuisinier, pâtissier, maçon. Ils pourraient aussi être utilisés pour Sentinelle…pour trois mois uniquement ! Autant dire, beaucoup d’énergie et d’argent dépensés pour pas grand-chose! On entend parler parmi la cacophonie du gouvernement que ce service sera principalement civil : comment, pourquoi faire, dans quels domaines ? Nul ne sait. C’est surtout l’auberge espagnole du laïcisme pour mieux formater notre jeunesse, notamment pour les mettre dans des associations accueillant les migrants! Quelle aide charitable !

Par ailleurs, le service militaire pour les filles est une gageure ! Le métier des armes est dédié d’abord aux hommes car l’on sait que la mixité dans les unités a toujours affaibli son efficacité : une femme ne porte pas le même poids qu’un homme, elle peut être la cible des ennemis, donc une faille dans  l’unité car il va falloir la protéger par une troupe d’hommes et en dernier lieu, mettre la pagaille dans une unité par son charme et ses atours qui peuvent mal se terminer. Demandez au service de santé des armées – SSA, qui possèdent 58% de femmes dans ses rangs ! Un haut gradé du SSA m’a fait part un jour – il s’occupait des ressources humaines – que c’était « un vrai bordel à gérer », « entre les couples nombreux, les femmes qui tombent enceinte – même si cela n’est pas de leur faute-, elles sont jeunes en majorité ce qui est le jeu normal, la garde des enfants » et désorganisent par leur absence les différents services, obligeant les soignants plutôt hommes à partir en opérations plus souvent qu’elles, une « entorse » à la sacro-sainte égalité des sexes !

 

Alors, en conclusion, même si sur le principe, la mise en place d’un service national militaire obligatoire pour les hommes paraît être un motif de satisfaction pour défendre « la patrie en danger », il est clair que cela ne se fera pas d’un coup de baguette magique. Et la mise en place d’un service civique équivalent non prioritaire devra représenter une véritable aide pour les français qui en ont véritablement besoin, par exemple les SDF ou les familles en difficulté, avec une durée plus importante qu’un service militaire par équité. A la vue du déficit budgétaire chronique de la France, il apparaît peu certain que cette option financière soit la bonne en ce moment, à part de saigner encore les français. Par ailleurs, le retour d’expérience du service national montre que le temps minimal doit être de 12 mois minimum. Cela nécessitera du temps (au moins 10 ans pour atteindre le rythme de croisière), car il faut tout reconstruire, reformer les cadres des armées et des autres ministères, dégager de la ressource humaine et financière complémentaire (indépendante du format des armées actuel car le naturel revenant au galop, on piochera dès que possible en gestion dans le portefeuille des armées, les militaires en ont l’habitude et l’expérience !), racheter les emprises, les réparer ou construire du neuf et se réapproprier le format d’instruction. Pour les femmes, cela ne serait que du volontariat dans des unités militaires dédiées et spécifiques comme les ambulancières au SSA*, dans le train des équipages ou dans certains services administratifs civils qui ne nécessitent pas de force physique spécifique.

 

 

Anatole Castagne

 

CFIM : centre de formation initiale militaire

SSA : service de santé des armées