Article tiré du numéro 9 de la revue Civitas (juin 2003) : La loi, le droit, la justice.

Sommaire

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Qu’en pense le magistère de l’Eglise ?

La prolifération des lois injustes dans le monde moderne

« Tel est le fatal enchaînement de nos temps, qu’il détache du fondement divin de la révélation non seulement la morale, mais aussi le droit théorique et pratique. Nous pensons ici en particulier à ce qu’on appelle le droit naturel, inscrit de la main même du Créateur sur les tables du cœur humain et que la saine raison peut y lire quand elle n’est pas aveuglée par le péché et la passion. C’est d’après les commandements de ce droit de nature, que tout droit positif, de quelque législateur qu’il vienne, peut être apprécié dans son contenu moral, et, par là même, dans l’autorité qu’il a d’obliger en conscience. Des lois humaines qui sont en contradiction insoluble avec le droit naturel sont marquées d’un vice originel qu’aucune contrainte, aucun déploiement extérieur de puissance ne peut guérir. » 1

Quelle attitude adopter… face à une loi injuste ?

« L’autorité exigée par l’ordre moral émane de Dieu. Si donc il arrive aux dirigeants d’édicter des lois ou de prendre des mesures contraires à cet ordre moral et par conséquent, à la volonté divine, ces dispositions ne peuvent obliger les consciences, car « il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes » (Act. V, 29). Bien plus, en pareil cas, l’autorité cesse d’être elle-même et dégénère en oppression. « La législation humaine ne revêt le caractère de loi qu’autant qu’elle se conforme à la juste raison ; d’où il appert qu’elle tient sa vigueur de la loi éternelle. Mais dans la mesure où elle s’écarte de la raison, on la déclare injuste, elle ne vérifie pas la notion de loi, elle est plutôt une forme de la violence. » (S. Thomas, Sum. Theol., Ia-IIae, q. 93, a. 3, ad. 2m; cf. Pie XII, Radio-message de Noël, 1944, A.A.S., XXXVII, 1945, pp. 5-23) » 2

…Et face au pouvoir politique qui les promulgue ?

« (…) L’Eglise préconise la paix et l’ordre, même au prix de lourds sacrifices, et (…) elle condamne toute insurrection ou violence injustes contre les pouvoirs constitués. D’autre part, (…) si le cas se produit où ces pouvoirs constitués combattent ouvertement la justice et la vérité au point de détruire jusqu’aux fondements mêmes de l’autorité, on ne voit pas comment on pourrait condamner alors le fait que les citoyens s’unissent pour défendre la nation et se défendre eux-mêmes, par des moyens licites et appropriés, contre ceux qui se prévalent du pouvoir public pour entraîner le pays à sa ruine. » 3

Civitas

1

S.S. PIE XI, Encyclique Mit brennender sorge, 14 mars 1937, aux évêques d’Allemagne, P.I.N., n° 676.

2

JEAN XXIII, Encyclique Pacem in terris, 1963. Nos lecteurs savent que nous sommes, pour de graves raisons, très réservés vis-à-vis de l’enseignement de Jean XXIII, qui apparaît cependant sur ce point en consonance avec la doctrine catholique traditionnelle.

3

S.S. PIE XI, Encyclique Firmissimam, 28 mars 1937, aux évêques du Mexique, P.I.N., n° 698.